Deuxième partie: l’absolutisme Monarchique (XVIè-XVIIIè s)

Les trois siècles qui précèdent la Révolution de 1789 confirment les efforts entrepris par les rois de France d’instaurer un pouvoir étatique souverain. La puissance de l’Etat se dessine tant théoriquement, par un intense effort doctrinal de la monarchie sur elle-même, que dans la pratique par une adaptation des principes du gouvernement royal aux réalités et à la personnalité des rois. Au cours de cette période, un terme s’impose pour désigner le gouvernement royal : celui d’absolu. La monarchie est dite absolue, la puissance du roi est absolue, l’autorité de l’Etat s’avère elle aussi absolue.

Mais contrairement au sens donné après la Révolution à cette caractéristique, le gouvernement royal ne se confond jamais entièrement avec l’arbitraire ou le despotisme. Sous l’Ancien Régime en effet il s’agit par là de désigner un régime politique où le détenteur d’une puissance attachée à sa personne concentre en ses mains tous les pouvoirs et gouverne sans contrôle. Pour autant, la construction de l’Etat royal a lieu dans le cadre contraignant du respect des lois fondamentales. Ainsi, la centralisation et l’égalitarisme qui seront l’œuvre entreprise par la dynastie des Valois puis des Bourbons se fera en conformité avec la sédimentation des usages, des lois divines et morales, des principes du droit et de l’administration mis en place par la lignée capétienne qui protègent le gouvernement royal autant qu’ils le limitent.

En résumé, de Charles VIII (1498) à Louis XVI (1792), le pouvoir royal triomphe autant dans les domaines militaire, financier, législatif que judiciaire. Cependant la période politique est troublée par une série de graves événements. Les guerres de religion déchirent le pays entre 1555 et 1589 et conduisent à une très grave crise qui remet sérieusement en cause l’autorité monarchique. La fin du règne des Valois est marquée par l’assassinat d’Henri III en 1589, qui meurt sans laisser de descendance.

Henri IV protège l’unité nationale en abjurant sa foi protestante mais en garantissant aussi par l’Edit de Nantes de 1598 la liberté de culte. Cette mesure permettra d’apaiser les tensions et de ramener la prospérité au royaume. L’économie et les finances sont redressées et l’autorité royale jouit de nouveau de ces progrès. C’est ensuite sous le règne de Louis XIII (1610-1643) puis de Louis XIV (1643-1715) que l’Etat monarchique se dote progressivement de structures politiques qui lui permettent presque d’exercer sans partage sa souveraineté. Sous ces règnes, les rois doivent faire face à de multiples difficultés tenant à l’opposition protestante et aristocratique pour le premier et par les cours souveraines pour le second (la Fronde 1648-1653).

Le règne autoritaire de Louis XIV sera une exception marqué par le développement de l’obéissance à l’égard des nobles, la centralisation de l’administration et la mise sous tutelle des forces sociales (Etats, parlements et villes) qui participaient auparavant à l’exercice du pouvoir.

Les règnes de Louis XV (1715-1774) et de Louis XVI (1774-1792) sont caractérisés par des tentatives de réforme des institutions et par des résistances dues notamment aux revendications politiques des parlementaires. En outre, la situation financière catastrophique aggrave la crise de croissance d’institutions dépassées par l’esprit de son siècle et les aspirations des Lumières à la liberté. L’impasse dans laquelle se fourvoie Louis XVI le conduit à réunir le 1 mai 1789 les EG qui moins de deux semaines après signifieront la fin d’une époque longue de plus de huit cent ans.

Il conviendra de voir dans 5 chapitres l’esprit des institutions royales consacrant la puissance absolue de l’Etat royal.

Ainsi nous nous intéresserons à la notion moderne de souveraineté et à ses conséquences institutionnelles, puis nous nous pencherons sur la question des moyens de gouvernement de l’Etat ainsi que sur celle des moyens de la mise en œuvre de la politique de l’Etat. Enfin on se questionnera sur la maîtrise de la loi et de la justice par le roi.


Chapitre Ier Pouvoir Royal et renouveau des idées politiques au XVIe XVIIe siècle

L’absolutisme ne peut se comprendre sans la théorie de la souveraineté qui se trouve à la base de l’Etat. Dans le prolongement du travail doctrinal de fondation de l’Etat moderne entrepris au Moyen-âge les penseurs politiques, les légistes et les rois de France vont ériger la souveraineté au rang de ce qui constitue l’âme de l’Etat. Des œuvres comme celle de Jean Bodin, Les six livres de la République (1576) constitueront un tournant décisif dans la formation de la monarchie absolue détentrice de la compétence législative. En faisant du roi le titulaire absolu de la fonction législative, les légistes de la Renaissance, viendront briser le pluralisme juridique des temps féodaux, et imposeront une vision centralisatrice de l’Etat monarchique.

Ill convient de voir dans une première section comment les théoriciens de la Renaissance ont sédimenté ce concept moderne de souveraineté, comme capacité à ne se reconnaître aucun supérieur et à édicter seul la loi (la loi royale n’étant plus un simple bouche trou de la coutume), puis de voir comment les idées absolutistes ont triomphé au XVIIe siècle, avec Louis XIV parangon de la monarchie autoritaire et absolue.

Section 1/ La souveraineté de l’Etat : promotion et contestation

 

Au cours du XVIe siècle la notion de couronne détache la personne du roi de la fonction qu’il exerce. Ce concept de droit public préfigure une abstraction plus poussée désignant une entité supérieure distincte du prince. La notion d’Etat, ou plus simplement de chose publique, ou encore de République apparaîtra ainsi à la Renaissance par le biais du renouveau des études des textes politiques de l’Antiquité (Platon, Aristote, Cicéron).

On ne pourrait pas évoquer en quelques mots toutes les étapes de la construction théorique de l’idée d’Etat, cependant il est nécessaire de mentionner l’importance qu’ont eu des penseurs comme Machiavel ou Bodin dans l’entreprise de promotion de la souveraineté de l’Etat (A) tandis que les idées développées par les monarchomaques à la suite des guerres de religion vise au contraire à restreindre les avancées de l’absolutisme (B)

§1/La souveraineté au service du progrès de l’autorité royale : Machiavel et Jean Bodin

Le XVIe siècle voit les idées politiques se régénérer par les références nombreuses empruntées à l’Antiquité visant à faire de l’Etat une entité autonome indépendante tout à la fois de ses formes et de la personne de ses gouvernants. Machiavel fait figure de précurseur de la science politique moderne et de la raison d’Etat, quand Jean Bodin place au cœur de la fonction royale le pouvoir de donner et de casser la loi.

A/Machiavel, précurseur de la raison d’Etat

Machiavel naît à Florence en 1469 et se fait connaître par ses activités d’écrivain (auteur de poésie, de théâtre, de stratégie militaire) et de conseiller du Prince Laurent II de Médicis. Il meurt en 1527 après des années de services rendus à sa cité, entrecoupés de moment d’exil et de disgrâces. Secrétaire à la chancellerie de la république florentine, Machiavel puise dans ses références antiques romaines et grecques (Aristote, Polybe, Tite Live) pour promouvoir l’unification des cités-états. Pour ce faire, il estime nécessaire de s’en remettre à un prince puissant. En effet, selon lui il n’y aurait d’unification sans prince.

Le prince trouve ainsi sa place au centre de l’Etat. Il n’est plus le suzerain des suzerains placé au sommet de la pyramide, mais bien au contraire le soleil qui rayonne et autour duquel s’agence toutes les institutions de l’Etat.

Ainsi, toute la philosophie politique de Machiavel tourne autour des deux notions centrales d’Etat et du Prince.

L’Etat tout d’abord. Longtemps on a attribué à Machiavel la paternité de ce terme. Si l’assertion est difficilement soutenable, il n’en demeure pas moins que c’est à partir de son œuvre que le terme se popularise. Notons aussi que Machiavel ne donne jamais une définition précise de l’Etat qu’il ne distingue pas clairement des gouvernants ou de ceux qui en ont la garde. Cette confusion entre l’Etat et le Prince constitue d’ailleurs un des facteurs fondamentaux de l’absolutisme que Machiavel prône en faveur du Prince.

En outre Machiavel soutient les arguments visant à séculariser l’Etat, c’est-à-dire à l’émanciper de la puissance et de l’influence de l’Eglise et du pape. La religion ne doit pas dominer l’Etat mais lui être subordonnée pour devenir un instrument de puissance et de cohésion sociale. Il en va de même de l’armée qui doit servir à assurer la sécurité de l’Etat à l’extérieur et devenir un instrument du civisme par le biais du service militaire. L’armée en outre doit permettre à l’Etat d’étendre sans cesse ses limites, de sorte que l’Etat est à la fois indépendant sur la scène internationale, dépris de ses liens avec les puissances terrestres ou spirituelles.

A la tête de cet Etat, Machiavel y place un Prince, qui s’il veut réussir à émanciper l’Etat des puissances concurrentes doit prendre des libertés avec la morale politique traditionnelle et imposer des méthodes de gouvernement qui visent avant tout à l’efficacité. Le prince machiavélien est alors calculateur et égoïste, porté à assurer la réussite de ses entreprises quelque soit le moyen mis en œuvre. La ruse, la subtilité, la dissimulation, voire l’hypocrisie est mise au service de l’Etat pour obtenir l’adhésion du peuple, pour ménager l’opinion publique. Affranchi de la morale traditionnelle, le Prince assure la sauvegarde et l’administration de l’Etat par le biais de la raison d’Etat, concept qui permet de toujours justifier les actions de l’Etat en dehors des références au bien ou au mal ;

Seul un prince unique peut servir de cette manière un Etat dont la première marque est de détenir sur ses sujets une autorité absolue. Machiavel sera l’un des plus proches conseillers des Médicis, de Laurent le magnifique, qui ne saura réussir l’unification des cités-états italiennes. Mais son arrière petite fille, Catherine de Médicis, reine de France grâce à son mariage avec Henri II, puis régente saura se souvenir des leçons du machiavélisme.

L’une des sources principales de l’absolutisme royal se trouve dans les œuvres de Jean Bodin et plus principalement dans son idée de souveraineté royale identifiée par la fonction législative du roi.

B/Bodin et la souveraineté de l’Etat

Né à Angers en 1530, Jean Bodin est un avant tout un humaniste écrivain qu’un homme d’action. Tout à la fois économiste et juriste souvent consulté sur les questions de droit public. Il finira sa vie en tant que procureur du roi à Laon et se montrera un défenseur de la royauté contestée par les protestants.

Dans son œuvre principale, les six livres de la république (1576), Jean Bodin s’intéresse principalement à la définition de la souveraineté et aux différentes formes que peut prendre l’Etat.

La définition de l’Etat par Bodin s’inspire de sa connaissance de l’histoire du pouvoir romain. Dans une définition restée célèbre, la république est selon Bodin cette chose publique qui « est le droit gouvernement de plusieurs ménages et de ce qui leur est commun avec puissance souveraine ».

Pour Bodin ce qui essentiel : c’est la souveraineté. Absolue et perpétuelle elle est la force d’union et de cohésion de la communauté politique. Elle caractérise le pouvoir de l’Etat qui doit être permanent dans la mesure où il est continu dans le temps et aussi absolu parce que c’est à lui qu’elle appartient en dernier ressort.

Ainsi, cette majesté suprême ne saurait être limitée ni par les souverains extérieurs, ni par le pape, ni par les lois. Bodin reconnaît toutefois que la puissance de l’Etat est cependant encadrée par le droit naturel et les lois de Dieu. C’est pourquoi la république de Bodin n’est pas arbitraire, mais s’identifie dans un gouvernement régi par le droit et la morale.

Toujours selon Bodin, la souveraineté se définit comme étant perpétuelle, absolue et indivisible. Perpétuelle, elle préexiste au roi et ne s’éteint pas avec lui. Absolue, elle suppose que les ordres de l’Etat s’impose à tous, y compris à l’égard de son chef, soumis naturellement aux lois de Dieu et de la nature. En cas de manquement à cette obligation principale, les sujets détiennent un droit légitime à l’insurrection et à la désobéissance.

En fin de compte, la souveraineté est définie comme le pouvoir qui décide en dernier ressort. La question qui va maintenant retenir Bodin sera de déterminer quel en sera le titulaire. Mais dans la mesure où la souveraineté est indivisible, seul un état monarchique semble possible. Le roi détient alors le pouvoir de faire et de casser la loi, de statuer en dernier ressort au dessus de tout tribunal quel qu’il soit. Pour autant, un roi n’est pas un tyran dans la mesure où le roi incarne une institution au service de l’Etat et du bien commun, respectueux de la liberté naturelle et de la liberté de propriété (à nuancer).

La souveraineté apparaît alors comme un concept construit dans le but d’interpréter le système de la monarchie pure dans laquelle le roi est seul maître des structures du pouvoir.

De cette théorie de l’unicité de la souveraineté, Bodin en déduit ce qu’il appelle les marques de la souveraineté, c’est-à-dire les prérogatives royales. Parmi celles-ci une s’impose à toutes les autres et les engendre toutes : La puissance suprême se caractérise par sa capacité à donner et casser la loi. Toutes les autres marques de la puissance suprême en découlent. Ainsi, la puissance législative remplace la traditionnelle juridiction en dernier ressort.

Le pouvoir législatif du roi de donner à tous en général et à chacun en particulier est exercé sans partage et sans besoin de consentement aucun. La formule « car tel est notre plaisir » figurant au bas des ordonnances royales n’exprime pas l’arbitraire mais fait entendre que la loi, issue de la raison bienfaisante du roi s’accordant au bien commun, ne dépend que de sa pure et franche volonté.

En définitive, faire la guerre, décider de la paix, battre monnaie, lever les impôts, nommer les officiers, juger en dernier par le biais de la justice retenue sont des prérogatives qui procèdent toutes de la puissance législative.

Par la suite, la pensée de Bodin sera reprise par une série importante d’auteurs qui assureront la transition vers l’absolutisme du XVIIe siècle. Ainsi en est-il de Guy Coquille (1523-1603) auteur de l’institution au droit des français, qui dans une formule célèbre traduira la toute puissance exercée par le roi dans l’Etat. Ainsi selon Coquille « le roi est monarque et n’a pas de compagnon en sa majesté royale ». De même pour Loyseau, dans son traité des seigneuries, la souveraineté apparaît comme « le comble de la puissance », la « forme qui donne l’être à l’Etat ».

L’Etat devient de cette manière un terme synonyme à celui de souveraineté.

Mais le XVIe siècle est aussi marqué par une théorie partagée de la souveraineté. Les guerres de religion opposant l’Eglise réformée aux princes catholiques entendent délégitimer la monarchie comme gouvernement idéal et unique à la consécration de l’Etat. De cette lutte idéologique entre protestants et catholiques découlent des théories du pouvoir politique hostiles tant à l’institution royale qu’à l’autorité des rois. Il convient de voir comment les thèses des monarchomaques (littéralement ceux qui combattent le souverain) protestants se rejoignent dans leur dénonciation du monarque absolue véritable tyran à leurs yeux. Leur doctrine aboutit à l’idée que la finalité de l’Etat réside dans la prospérité de tous les membres du corps social. Ils mettent en avant la notion de contrat entre la population et le souverain tout puissant.

§2/ Les thèses opposées à la monarchie absolue : les monarchomaques protestants et catholiques.

 

A/ les doctrinaires protestants

Pendant longtemps les protestants (1517) ménagent la royauté, surtout vrai sous le règne de François Ier. Mais après le massacre de la saint Barthélémy en août 1572, encouragé par la régente Catherine de Médicis, les doctrinaires protestants se radicalisent autour des œuvres de François Hotman (1524-1590) professeur de droit à Bourges notamment (auteur de la Franco-Gallia) et de Théodore de Bèze (1519-1605) successeur de Calvin et chef des églises réformées de France. Son œuvre principale, intitulée Du droit des magistrats sur leurs sujets, est représentative des théories monarchomaques visant à limiter la toute puissance du roi.

Ils condamnent tout d’abord l’absolutisme et les lois de succession pour promouvoir des moyens tempérés de gouvernement et de légitimation. C’est ainsi que Hotman privilégie l’élection du roi par les grands et le partage de ses compétences avec ces derniers, notamment en ce qui concerne l’administration de la justice et la production de la loi. Ainsi la monarchie se trouvait composée et tempérée, elle apparaissait comme un régime mixte dans la pure tradition aristotélicienne.

Pour F Hotman, les EG doivent jouer ce rôle de médiateur entre le roi et le peuple. Les EG représentent alors la nation toute entière. Le roi est obligé de les convoquer et de les associer à la production normative.

Pour Th de Bèze, le modèle de gouvernement idéal est celui de Genève. Gouvernement où les magistrats sont limités par le respect des lois divines et du droit naturel. En outre son pouvoir se doit d’agir moralement en respectant la charité et la piété. En l’absence des ces données fondamentales, il n’y a pas de légitimité à gouverner. Ainsi, le roi tient son pouvoir autant de dieu que du peuple.

C’est d’ailleurs dans cette idée de consentement populaire que réside véritablement la plus importante critique faite à l’autorité sans partage du roi. Ainsi pour Th de Bèze, il y a bien un contrat entre le roi et ses sujets. Le roi ne tient son pouvoir que du consentement du peuple et ce consentement est à la base un contrat fondé sur la bonne foi et la raison.

De la même manière l’élection du roi selon les thèses de Hotman revient à reconnaître que la source de son pouvoir réside dans le peuple, qui dans le cadre d’un contrat tacite a décidé de lui en déléguer une partie. Mais Hotman va plus loin en distinguant la souveraineté de l’Etat, toujours attachée à la collectivité, du tuteur de cette souveraineté : c’est-à-dire le roi qui en reçoit un exercice délégué. Ainsi le peuple apparaît supérieur au roi qui doit lui demeurer soumis tout comme il l’est aussi à Dieu. La mission du roi est donc contractuellement définie et ne peut être remplie que dans un cadre strict. Tout souverain qui s’en écarte devient un despote auquel le peuple n’est plus obligé d’obéir.

La résistance à la tyrannie constitue un véritable droit chez les monarchomaques. Ainsi les auteurs distinguent 2 cas de figure dans lequel la désobéissance au roi est encouragée ainsi que les moyens à mettre en œuvre.

Lorsque le roi enfreint la loi divine, lorsque le roi viole la loi civile. Dans ces deux cas, le peuple peut faire appel aux princes étrangers. Se dégage ainsi une définition du tyran qui est celui qui viole les lois divines et civiles préexistantes à l’Etat. Le roi est donc doublement encadré par la norme religieuse et civile, dans la mesure où le peuple reçoit de dieu le pouvoir de déléguer son pouvoir au profit d’un prince soucieux des intérêts communs. Nuance pas une démocratie mais plutôt une aristocratie qui est amenée à collaborer avec le roi au sein des institutions étatiques.

B/ les doctrinaires de la ligue et l’opposition catholique

Sous le règne de Henri III et Henri IV, les protestants changent d’attitude et soutiennent la royauté. C’est au contraire, les doctrinaires catholiques qui prennent alors leurs distances.

Une ligue se constitue en 1576 dans le but de défendre la religion catholique. Et, chose paradoxale, même si son hostilité à la royauté est certaine les doctrinaires de la ligue ne font que réutiliser les arguments des monarchomaques protestants. Ainsi, Jean Boucher dans son « de la juste abdication du roi d’Henri III » ne parvient pas à dégager une théorie nouvelle.

Ont retrouve comme chez les premiers la volonté de placer la royauté sous tutelle : une tutelle du peuple ou d’origine divine. Elu ou désigné par le peuple, le roi peut être déposé par lui s’il s’écarte de la voie qui lui a été tracée. Régner n’est rien donc qu’exécuter une contrat conclu avec le peuple. Ainsi la couronne n’est pas héréditaire mais élective ce qui au final donne au régime souhaité un mélange de théocratie et de démocratie.

Henri III est pour Boucher le parangon du despote envers lequel le peuple n’a aucun devoir d’obéissance. Davantage, il a le droit impérieux de déposer le roi défaillant. Les griefs à l’encontre du roi sont nombreux puisqu’il est à la fois parjure (choix d’Henri de Navarre comme successeur, édit de tolérance) assassin du duc de guise, mais aussi « sacrilège, fauteur d’hérésie, simoniaque, magicien, dissipateur du trésor public, ennemi de la patrie » de sorte que son assassinat par un monarchomaque est parfaitement justifié. La déposition et le régicide sont donc acceptés comme des moyens légitimes pour corriger les dérives de la monarchie. Mais ce sont des moyens radicaux qui ne sauraient contraindre le roi au quotidien. C’est pourquoi, l’exercice du gouvernement doit être placé sous la surveillance des Etats, représentants de la nation.

Ainsi pour les monarchomaques, protestants ou catholiques, le pouvoir royal se trouve sérieusement limité aussi bien dans sa source que dans son exercice. En outre, si le roi se comporte en despote, les sanctions sont immédiates et extrêmement graves. De ces théories résultera un climat délétère et violent marqué par les assassinats en série des chefs protestants ou catholiques, François et Henri de Guise, l’Amiral de Coligny, Henri puis Henri IV.

Pour autant les thèses monarchomaques n’arriveront pas infléchir le progrès des idées absolutistes. L’Etat souverain, détenteur exclusif de la puissance de commandement en dernier ressort s’impose réellement au XVIIe siècle, époque qui verra se forger définitivement l’idée de la puissance suprême de l’Etat.

Section 2/ Le triomphe des idées absolutistes au XVIIe siècle

C’est principalement sous les règnes d’Henri IV, de Louis XIII, de Louis XIV que la doctrine absolutiste s’épanouit. Elle doit beaucoup aux théoriciens et praticiens des règnes que sont dans l’ordre Loyseau, Cardin le Bret, Richelieu, Bossuet et in fine Louis XIV lui-même. Tous ces auteurs considèrent que si la royauté doit être absolue elle ne saurait être arbitraire.

Richelieu et plus tard Bossuet contribueront grandement à parachever le régime monarchique absolutiste.

§1/Une monarchie certes absolue mais non arbitraire

Comme l’affirmait déjà Bodin, le régime idéal correspond à une monarchie pure et absolue dont les postulats de base font du roi un arbitre suprême ne tenant son pouvoir que de Dieu seul. Il convient d’éclaircir ces deux présupposés.

Arbitre suprême laisse entendre que sa décision s’impose à toutes les autres quelques soient les circonstances. Ainsi, la volonté royale prévaut sur celle des seigneurs, des Parlements, des EG et accapare entièrement toutes les marques de la souveraineté. Imposer sa décision passe nécessairement par le monopole de la fonction législative. D’où la formule au bas des ordonnances « car tel est notre plaisir », qui ne traduit pas une volonté despotique, mais l’idée que le roi s’estime seul compétent pour légiférer et qu’à force de loi tout ce qu’il juge bon pour le royaume et ses sujets.

Roi par la grâce de dieu maintenant : ici les théoriciens de l’AR ne font que reprendre les thèses de la monarchie sacrée des temps féodaux. Le roi ne tient sa couronne d’aucune autorité spirituelle ni temporaire, mais d’un principe éminemment supérieur, créateur du monde et ordonnateur des pouvoirs à l’image du père des hommes.

La monarchie est ensuite réglée par des lois tant morales, divines que civiles.

La religion constitue les barrières morales les plus solides à l’exercice de la souveraineté royale. Roi par la grâce de Dieu il est comptable devant Dieu de sa gestion. De sorte que le droit divin impose au roi tout autant de devoirs qu’il lui confère de droits.

Après la religion, l’une des limites au pouvoir royal est le respect du droit naturel qui postule l’inviolabilité des personnes et de leurs biens (respect des libertés personnelles et familiales, respect de la propriété privée).

A ces freins moraux et religieux : viennent s’ajouter les lois fondamentales, la liberté des corps, des ordres et des pays.

En fin de compte ces différents éléments constituent un bloc juridique supérieur à la volonté du roi et auquel il devait obligatoirement se soumettre.

Le gouvernement monarchiste va connaître une rationalisation importante de ces principes absolutistes grâce aux théories appliquées par deux grands serviteurs et conseillers du roi que seront le Cardinal Richelieu et l’évêque de Meaux, Bossuet.

§2/ L’absolutisme selon Richelieu et Bossuet

A/ La pensée de Richelieu : le prince et son ministre principal

Pour Richelieu il ne peut y avoir « qu’un seul pilote au timon de l’Etat ; rien n’est plus dangereux que diverses autorités égales en l’administration des affaires ».

Ce faisant, le cardinal exclut toute collégialité au sommet de l’Etat. Les EG ainsi que les états provinciaux sont condamnés et Richelieu se montre très hostile à leur convocation et à leur consultation. A l’égard des parlements, son attitude est la même, leur reprochant d’intervenir de manière inopinée dans les affaires politiques.

A la rigueur Richelieu consent au Prince de s’appuyer sur la noblesse, qui cependant ne saurait se cantonner qu’aux affaires militaires. A l’endroit du peuple, le roi doit faire preuve d’une grande méfiance. Il convient de le maintenir à distance, de le maintenir dans une condition inférieure.

Au final, Richelieu rejoint les analyses de Machiavel. Seul le résultat compte et la raison d’Etat permet au final de légitimer toutes actions politiques du prince. Rien d’autre que l’intérêt supérieur de l’Etat et de la couronne ne doit lui dicter son action. Tout au plus peut-il compter sur le soutien avisé de son principal ministre.

Gouverner, ce qui selon Richelieu consiste à « négocier constamment », représente une tâche particulièrement lourde pour un roi qui ne peut exercer seul la direction du royaume. C’est pourquoi Richelieu conseille de s’entourer d’un très petit nombre de fidèles conseillers. Combien. Tout au plus 4 conseillers d’Etat, dont l’un serait privilégié par rapport aux autres et détiendrait une autorité sur le reste des conseillers d’Etat. Ce faisant le roi pourra compter sur la compétence, la fidélité et la loyauté de son ministre principal. A cette occasion se dégage une théorie du ministériat qui consiste à guider le roi dans le choix de la meilleure des décisions.

Le portrait du premier ministre selon Richelieu se décompose comme tel : probité, capacité, courage, indépendance par rapport à toute autre autorité, et enfin condition essentielle : totale confiance mutuelle entre le roi et le premier ministre.

Les qualités de l’équipe ministérielle sont ensuite les suivantes : confiance, relative liberté de parole laissée aux ministres, récompenses régulières si les services rendus sont à la hauteur des espérances du roi, et enfin une protection efficace de la part du souverain.

Ainsi, le roi est déchargé de devoir tout faire en détail, ce qui permet une plus grande efficacité du travail gouvernemental.

B/ L’absolutisme théocratique de Bossuet

Avec Bossuet (1627-1704) on atteint les sommets de l’absolutisme. Un véritable culte du monarque est mis en place. En effet, au moment où l’évêque de Meaux écrit le règne de Louis XIV est à son acmé : réussites militaires, diffusion des arts et des lettres, magnificence du pouvoir…C’est dans son œuvre magistrale « la politique tirée des propres paroles de l’Ecriture sainte » que se dévoile l’essentiel de sa pensée. Pour autant, même si les références à la bible sont constantes Bossuet ne perd pas de vue les préoccupations d’actualité.

Pour Bossuet, la monarchie est essentielle car c’est elle qui assure l’unité et l’ordre du pays. Symbole d’autorité le pouvoir d’un permet de freiner les violences, de réprimer les passions, d’éviter les divisions et le recours à la force.

Dieu seul est le vrai roi qui assure son autorité sur l’ensemble des individus. Le pouvoir est donc une invention divine délégué par la suite à un roi, jouant le rôle d’intercesseur entre l’universel et le monde terrestre. Pour Bossuet donc le roi tient son pouvoir de Dieu, devant lequel il est comptable de ses actions, de son office de guider son peuple vers le Salut. Dieu établit les chefs des peuples et en fait ses propres ministres par l’intermédiaire desquels il règne.

En conséquence enfreindre les ordres c’est désobéir à Dieu et commettre un véritable sacrilège et méconnaître les lois de la nature qui présupposent l’existence d’un empire paternel. De sorte que le régime monarchique pour cette raison, mais aussi en raison de son ancienneté, s’impose naturellement comme l’unique forme de gouvernement valable permettant de pérenniser l’Etat.

La soumission des sujets à l’autorité royale s’explique aussi du fait que le roi exerce une autorité légale, c’est-à-dire déterminée par des lois qui définissent le cadre d’action du gouvernement. Ces lois, inspirées par l’équité et la raison, guident l’autorité royale sur le droit chemin. Bossuet exprime clairement le fait que ces lois fondamentales s’imposent au roi même absolu. Cette autorité raisonnable est la deuxième caractéristique de l’autorité royale selon Bossuet. Dieu en effet a confié au roi le pouvoir en raison de leur naturelle sagesse et de leur conduite irréprochable. L’autorité royale apparaît aussi en troisième lieu comme paternelle. Le roi doit être aimé de ses sujets, ce qui suppose qu’il doit être bon à leurs égards, de surcroît à l’éga rd des plus malheureux et des plus pauvres. A la loi et à la justice s’ajoutent la clémence, la douceur et la bonté.

Bossuet vient donc au tout début du XVIIIe siècle faire la synthèse de plusieurs siècles de doctrines relatives au caractère sacrée de la royauté. L’absolutisme auquel il se réfère cependant en 1709 est paradoxalement contesté. Le peuple faisant sentir son désir de liberté et d’autodétermination.


Chapitre II : Le triomphe de la loi

Section I : L’expansion de la loi : le développement du pouvoir normatif royal

Érigée en source créatrice du droit, la loi joua, à l’époque moderne, un rôle bcp plus importante que celui de la coutume qui, désormais privée de sa fonction dynamique, se trouva confinée ds un rôle statique de source normative du seul droit privé (cf. infra). Phénomène lié :

– à l’évolution générale d’une société de plus en plus individualiste, ds laquelle la conception sociale et juridique de la famille et des groupements diminue inexorablement : sécurité de l’individu passe désormais par l’Etat, garant puis gérant de l’ordre politique, économique et social, et dont la loi constitue le pcipal instrument d’action.

– au dév. de la culture écrite et à l’accroissement des connaissances ;

– surtout : au renforcement des pouvoirs souverains confondus en une même main ds la plupart des États d’Europe. La grandeur de la monarchie et l’unification de la France passaient par une activité législative de plus en plus envahissante : la loi = un instrument efficace de modification du réel politique, social et économique. La suprématie de la loi correspond donc clairement à la mainmise de l’Etat sur le droit. La France d’AR prépare le légalisme triomphant de l’époque contemporaine.

Théorie du pouvoir législatif royal : La loi se définit matériellement par son caractère impératif, général et permanent. L’Antiquité grecque, puis romaine, nous en a légué le concept, et même les modèles formels : manifestation étatique par excellence, dont la réapparition à partir du XIIè s. est liée à la volonté de puissance de la royauté capétienne (cf. supra).

Cepndt : la notion de pouvoir législatif du roi n’a jamais été vraiment précisée jusqu’à la Rév. et le terme même de pouvoir législatif fut ignoré jusqu’au XVIIIè s. Il faut donc l’entendre comme :

« le droit pour le roi de prendre des mesures contraignantes, d’un certain degré de généralité et de permanence, connues à l’époque sous le nom de lois du roi ou d’ordonnances. »

Des origines médiévales illustrées par les développements de Philippe de Beaumanoir (cf. supra) subsista toujours le pcipe du gouvernement par conseil, qui put d’ailleurs revêtir des formes diverses :

– conseil féodal médiéval

– États généraux (XVè-XVIè s.)

– conseils de gouvernement plus techniques et plus resserrés de la monarchie administrative (XVIIè-XVIIIè).

Notion de bien commun persiste également, sous les espèces de l’intérêt général, dont le roi apparaît comme le seul véritable garant : « ce qui plaît au roi a force de loi ». Le souverain, moteur de tt l’appareil étatique, incarna t. vite les intérêts de la nation naissante ; il en tira une légitimité l’autorisant à légiférer sur le mode d’un droit universel, à organiser l’ordre public économique et à s’immiscer ds les divers droits procéduraux dès le XVIè s., voire ds le champ bien gardé du droit privé au cours du XVIIIè s.

Dès lors que cette mutation se trouva réalisée, on commença à considérer la coutume comme le droit collectif d’une somme d’intérêts particuliers : caractère infiniment moins universel que celui de la loi.

Croissance progressive de l’Etat et dév. concomitant du pouvoir royal ont donc entraîné une multiplication des actes législatifs offrant une grande diversité de forme (A) mas une commune complexité de procédure (B).

A- La diversité des actes royaux

L’exercice du pouvoir législatif à l’époque moderne :

  • Le principe: A la différence du syst. anglais, c’est le roi seul qui légifère, puisqu’il résume en lui tt le pouvoir monarchique : comme seul représentant de Dieu et de l’intérêt général, il est la loi vivante la lex animata. Loysel : « Qui veut le Roy, si veut la loy» (Institutes coutumières de 1607) : le roi est à l’origine de tout l’ordre juridique (cf ; la formule « car tel est notre plaisir. »). Pouvoir théoriquement illimité parce que la puissance souveraine ne sauroit être bornée, se trouvant hors des lois elles-mêmes : princeps legibus solutus est (D. I, 2, 31).

Néanmoins, en pratique, la monarchie se plaça t. en retrait de cette doctrine qui constitua d’avantage une prétention politique qu’une maxime de gouvernement (cf. La loi Digna Vox : « C’est une parole digne de la volonté du prince que de se reconnaître soumis aux lois. »). Tant par prudence politique que par fidélité aux droits acquis et à la tradition, la royauté s’accommoda couramment d’un état de droit antérieur, souvent archaïque, qui freina la modernisation de la France.

En outre, respect nécessaire des privilèges et prégnance de la loi morale : espaces de libertés corporatistes (« Sire, vous pouvez tout mais vous ne devez pas tout vouloir. »)

  • Le domaine des lois du roi:
  • Territorialement: Les principes de territorialité absolue et d’exclusivité s’appliquaient ds te leur force. Les lois du rois étaient exécutées ds tt le royaume, mais par une manifestation expresse de la volonté royale, un texte pouvait être limité seulement à une fraction du territoire.

Au terme d’une concentration étatique irréversible, la monarchie exerçait seule l’autorité législative, puisqu’en vertu d’un édit de 1572, les seigneurs territoriaux ne pouvaient plus faire d’ordonnances et de règlements, sauf en les conformant aux ordonnances royales ;

En outre, les villes, jadis autonomes, avaient perdu tt pouvoir créateur de droit pour ne conserver qu’une activité réglementaire exercée en matière de voirie, d’urbanisme, de fiscalité locale, sous la tutelle du représentant du roi.

  • Matériellement: Par un partage de pcipe issu de la tradition et de la crise de l’Etat au MA, les coutumes générales et particulières régissaient pcipalement les droits réels et personnels et une large part du droit pénal, tandis que les lois du roi réglaient les autres rapports socio-économiques. Toutefois, il n’est pas loisible d’opposer à ce propos un droit privé, de nature coutumière, et un doit public, plutôt législatif : distinction trop contemporaine, ss véritable correspondance ds l’ancien droit. En outre, la prééminence de la coutume en matière de droit privé ne valait que pour les matières fixées ds le passé, non pour celles à venir après le processus de rédaction des règles coutumière ; roi incité à légiférer en matière civile et notamment familiale.

Ds cette nomenclature matérielle des champs de compétence, imptce centrale de la notion de police, qui concourut pour une large part au développement des interventions législatives royales : concept aux contours flous se rapprochant d’un pouvoir d’administration générale dont le but avoué = la prospérité et l’ordre et qui tend à obliger chaque sujet à remplir les devoirs de son état. Champ immense allant ds le sens du dév. de la monarchie administrative.

D’une manière générale, donc , ttes les matières qui n’étaient pas soumises aux droits coutumiers rédigés ou aux privilèges des corps, pratiquement tous fixés au XVIè s., pouvaient entrer ds le domaine législatif royal : seul champ de compétence véritablement dynamique, face à une coutume sclérosée par la rédaction de ses principales dispositions. En outre, imptce quantitative et qualitative des besoins nouveaux engendrés par l’essor social et économique du pays.

Remarque concernant la nomenclature des actes législatifs :

  • confusion des pouvoirs entraîne l’absence de distinction entre actes législatifs et actes réglementaires: nbreux actes d’administration individuels (comme par exemple une lettre de provision)pris sous une forme législative : ne doivent pas être confondus avec des actes de législation stricto sensu : définition purement matérielle, non formelle, du phénomène législatif.
  • absence de système formaliste stable pour structurer l’expression de la souveraineté royale à travers ses actes : Jusqu’à l’époque moderne, les lois du roi ont porté des noms variés : établissements constitutions, statuts, pragmatiques sanctions, ordonnances. Ce dernier terme supplanta assez vite tous les autres pour signifier, ds une acception large, tte intervention législative du roi, quelle que soit sa forme ou son contenu.

Toutefois, ce même mot d’ordonnance, pris au singulier, possédait un sens plus étroit et surtout plus technique, et désignait un type bien précis d’intervention législative. Langage juridique encore mal fixé et mal assuré ds ses techniques empiriques : signe d’un Etat encore ne construction. Terminologie flottante ; formes diplomatiques diversifiées. D’où une impression générale de grande confusion. Par conséquent, la nomenclature qui suit = une simplification valable seult pour la fin du XVIIè et surtout pour le XVIIIè s.

Ds le dernier état du droit, les actes législatifs revêtent une forme principale : les lettres patentes, et 3 formes complémentaires (les arrêts du conseil du Roi ; les ordonnances ss adresse ni sceau ; les lettres closes). Le choix de la forme d’un acte dépendait :

– du sujet traité (notamment de son degré de généralité) ;

– du mode de contrôle qu pouvait s’attacher à telle ou telle catégorie d’actes. Si la tradition commandait encore le recours aux lettres patentes, le pragmatisme gouvernemental domina svt pour échapper à la surveillance des plts en multipliant les arrêts du conseil, par exemple. D’où une distinction faite par la doctrine contemporaine entre deux types d’actes :

– les actes de puissance « ordinaire » ou « réglée » du roi : mode de gouvt associant le souv. à des corps constitués capables de le conseiller, de collaborer avec lu et de le tempérer (États, plts, …) : puissance législative exprimée sous le forme traditionnelle des lettres patentes enregistrées et publiées par les cours souveraines (1) ;

– les actes de « pleine puissance » ou de « puissance absolue » que le roi émettait seul en cas de nécessité, de raison d’État ou de prérogative impartageable (affaires militaires ou diplomatiques par exemple). Formes diverses, nouvelles, que la monarchie absolue employa de + en + svt pour se soustraire à l’opposition parlementaire (2).

Ce dernier point montre bien que la seule limite véritable imposée à la souveraineté royale = la raison et Dieu, non le formalisme de procédures qui peuvent toujours être tournées.

1- Les formes traditionnelles d’expression du pouvoir normatif

Elles constituent l’expression privilégiée de la puissance ordinaire du roi. Il s’agit de lettres patentes, c’est à dire ouvertes, écrites sur parchemin et commençant par une adresse au nom du roi : « Louis, par la grâce de Dieu, roi de France à tous ceux qui cette lettre verront, salut ». Suivaient un préambule plus ou moins long, indiquant les motifs de l’action, puis le dispositif où le roi exprimait sa souveraineté par le pluriel de majesté. Les articles s’y articulaient si nécessaire en titres et en chapitres. L’acte se terminait par une longue formule exécutoire puis par la signature du roi contresignée depuis le XVIè s. par u secrétaire d’État. Apposition du sceau du royaume dont la couleur de la cire (jaune, verte ou rouge) et la nature des lacs de soie et de laine variaient selon le type et la solennité de l’acte.

Lettres patentes toujours soumises à l’enregistrement, donc au contrôle des cours souveraines : caractéristique essentielle les opposant aux autres formes auxquelles le roi recourut le + svt.

Distinction à opérer entre ces actes selon des catégories fonctionnelles, en précisant que c’étaient la matière et le destinataire qui les différenciaient, et non le degré de normativité. 2 types pcipaux :

– les grandes lettres patentes, de portée générale (a)

– les petites lettres patents, mesures de portée plus individuelle (b).

a)- Les grandes lettres patentes

Là encore, une nouvelle distinction s’impose, tjrs en fonction du plus ou moins grand degré de généralité et de solennité de l’acte, entre les ordonnances (a), les édits (b) et les déclarations (g).

a)- L’ordonnance

Il s’agit ici de l’ordonnance, considérée ds son acception stricte et technique.

Acte de portée générale et permanente, réglant une matière ou une série de matières, l’administration de la justice ou des eaux et forets par exemple. L’ordonnance peut également contenir les dispositions les plus diverses, telle une loi fourre-tout.

L’ordonnance se caractérisait donc surtout par la généralité de son champ territorial et par sa solennité : les grandes réformes et les tentatives de codification des XVIIè-XVIIIè s. se firent par voie d’ordonnances. Bref, l’ordonnance = l’acte législatif par excellence, expression de la plénitude de la majesté royale.

b)- L’édit

Traitait au contraire d’un sujet bien défini (le duel, la taile), ou n’intéressait qu’une région délimitée ou une catégorie spéciale de sujets (noblesse, corps de métiers, protestants,…).

La différence entre ordonnances et édits était svt bien mince. Toutefois, à titre d’exemple fameux, on cite svt 2 textes datés des mêmes lois et lieux et que l’on ne doit pourtant point confondre :

– l’ordonnance de Moulins de février 1566 : réforme l’administration de la justice ds son ensemble = vaste question s’appliquant à la totalité des justiciables du royaume ;

– l’édit de Moulins de février 1566 également : définit la gestion du domaine de la couronne et confirme son inaliénabilité ; ne concerne par conséquent qu’une catégorie spécifique de biens, ceux qui appartiennent au domaine public de l’Etat royal.

g)- La déclaration

Se présente comme un acte interprétatif d’une ordonnance ou d’un édit, d’un privilège, voire d’un article de coutume en vigueur : explique, réforme ou restreint des textes antérieurs sur des points particuliers. N’est donc pas à proprement parler un acte pleinement créateur de droits nouveaux : simple aménagement d’institutions juridiques existantes. A la différence des édits et ordonnances, seult datés du mois et de l’année, les déclarations portent également la mention du jour de leur adoption.

b)- Les petites lettres patentes

Ne portent aucune dénomination spéciale (= ni ordonnance, ni édit, ni déclaration). Dûment scellées et enregistrées, comme les autres lettres patentes, elles concédaient le privilège d’une situation juridique spécifique à une province, une ville, une cour souv., un corps de métier, ou un simple particulier. Relèvent bien de la confusion des pouvoirs, ds la mesure où il est t. difficile de dire si elles constituaient des actes de législation, d’administration ou de juridiction.

On les subdivise en 3 catégories pcipales :

– lettres royaux (a) ;

– lettres de sceau (b) ;

– lettres de privilèges permanents (g)

a)- Les lettres royaux

On appelait ainsi ttes sortes de lettres émanées du roi scellées du grand ou du petit sceau. Elles intervenaient sur requête, toujours pour délivrer une concession ou accorder un droit nouveau, le + svt exorbitant du droit commun.

  • Lettres de grâce délivrées en grande chancellerie et scellées du grand sceau : accordées par faveur par le roi à qui bon lui semblait : bon vouloir fondé sur le pcipe de souveraineté.

– ds le domaine pénal lettres d’abolition (remise de la peine de mort), de pardon, de commutation de peine, de rappel de ban , etc.

– ds le domaine civil ou commercial : lettres de séparation de biens, de bénéfice d’inventaire, de permission de vendre, etc.

  • Lettres de justice : lettres de petit sceau, fondées sur le droit commun ou portant mandement de rendre la justice. Ce qui les distinguait des précédentes = la volonté du roi d’en institutionnaliser la délivrance en abandonnant à ses officiers de judicature l’examen du bien fondé des requêtes.

b)- Les lettres de sceau plaqué

Relevaient ds leur ensemble du domaine de l’adm. publique. Elles étaient adressées à des officiers de finances, de justice, etc., et contenaient des instructions adm. analogues aux circulaires ministérielles modernes. Elles furent innombrables sous le nom de mandements, jusqu’au XVIè s. Elles prirent la forme de lettres de sceau aux XVIIè-XVIIIè s. sceau plaqué sur un carré de papier recouvrant la cire.

g)- Les lettres de nomination et de privilège

Lettres patentes à caractère individuel contenant une nomination (lettres de provision d’offices ou de commission) ou une concession personnelle (lettres de noblesse ; création de manufactures royales ; lettres de course). Pouvaient également concerner la concession d’un privilège collectif à un corps de métier (monopole éco.), une ville (exemption fiscale) ou la constitution d’une nouvelle personne morale (un corps professionnel, une société littéraire, etc.).

2- Les formes nouvelles revêtue par la puissance du roi

Échappant à la pesante censure des cours souveraines, elles se multiplient au cours des XVIIè-XVIIIè s., tant en ce qui concerne les actes à portée générale (a) qu’en ce qui regarde les actes à portée spéciale (b). On notera toutefois que cette distinction commode souffre un certain nombre de tempéraments, tenant à la nature hybride de la plupart de ces textes.

a)- Les actes à portée générale

Il s’agit essentiellement des arrêts du conseil du roi (a) et des ordonnances sans adresse ni sceau (b).

a)- Les arrêts du Conseil du Roi

Procédure d’enregistrement des lettres patentes est politiquement aléatoire, conduisant la royauté, surtout à partir du règne de Henri IV, à utiliser la forme des arrêts du conseil. De nombreuses et importantes mesures novatrices prirent ainsi cette forme, les arrêts pouvant au demeurant être rendus hors de la présence du roi, et simplement signés et expédiés par un secrétaire d’État.

Env. 800 000 arrêts du conseil du roi : sont encore mal connus. Conseil = un organe complexe, polymorphe, qui, près du roi, et théoriquement toujours à titre consultatif, participait au gouvt, à la justice retenue du roi et à la préparation de la loi. Les particuliers, comme les collectivités, y portaient leurs affaires. Les actes du Conseil étaient donc multiples et divers :

– arrêt simple : décision de justice parfois investie d’une portée générale et réglementaire ;

– arrêt en commandement de procédure expéditive, immédiatement exécutoire par les autorités auxquelles il était adressé = acte d’administration et de gouvernement pris ds les conseils de gouvernement où siégeaient ordinairement le roi et ses ministres (Conseil d’État, Conseil des Dépêches, Conseil des finances). Manifestation la plus directe, pour ne pas dire la plus brutale du pouvoir législatif du roi. Échappant à tout contrôle, même à celui du chancelier, ces arrêts furent svt de véritables lois et exaspérèrent considérablement les cours souveraines.

b)- Les ordonnances sans adresse ni sceau

Elles constituent l’expression de la pleine puissance du roi sous sa seule signature. Genre parfaitement caractérisé, dont on possède de nombreux exemples depuis le XIVè s. Leur emploi s’amplifia au XVIè pour subsister jusqu’à la fin de la monarchie adm.

Elles se présentaient sous une forme impersonnelle, sans adresse, avec pour simple formule : « Le roi veut et ordonne », ou, au XVIIIè s. «  De par le Roi », à l’instar des lettres de cachet. Le sceau du royaume n’y était pas apposé, la seule signature du Roi, avec le contreseing d’un secrétaire d’État les validait, sans avoir à subir l’enregistrement en cours souveraines. Elles étaient donc directement appliquées par les autorités civiles ou militaires auxquelles elles étaient adressées. Régissaient des domaines ds lesquels le roi avait toujours décidé seul et sans contrôle : celui des affaires militaires et de sa propre maison. Les impératifs de la guerre justifièrent cette pleine souveraineté qui permit la libre adm. de l’armée, de la marine et des colonies. Il en était de même de l’organisation du Conseil du Roi t de la Maison du Roi. Les déclarations de guerre, enfin, étaient également faites ds cette forme péremptoire, pour manifester que cette prérogative appartenait au Roi ss dépendance et ss partage.

b)- Les actes à portée spéciale

a)- Les brevets

Brevets en forme de P.V. par lesquels le roi concédait une grâce quelconque, ou nommait à un poste ou à un grade : brevet de conseiller du roi, par exemple.

b)- Les lettres closes

Ce n’étaient certes pas des actes de législation, même si leur émission se fondait parfois sur le pouvoir législatif du roi. Elles n’en apparaissent pas moins comme une forme complémentaire et bâtarde des actes royaux.

Lettres closes préparées par les bureaux des ministres, signées par le roi et contresignées par un secrétaire d’État ; elles étaient scellées du sceau du secret (sceau personnel du roi). Servaient à toutes sortes d’usages : ordres de détail donnés à des agents royaux ; convocation aux assemblées d’États provinciaux ; lettres aux bonnes villes, etc.

Les plus connues = les lettres de cachet, portant toujours en en tête « De par le Roi » et exprimant un ordre adressé à un corps constitué pour une réunion, à un magistrat pour le mettre en possession de son office, à une cour souveraine pour la prier de procéder à l’enregistrement d’une ordonnance, ou à un lieutenant de police pour lui enjoindre d’arrêter ou d’exiler une personne nommément désignée, sans autre forme de jugement : prises autant pour affaires d’État, de religion, de police, que ds l’intérêt des familles, sur requêtes des particuliers. Véritables actes de juridiction, plus que d’adm., fondés sur la toute puissance judiciaire du roi.

B- La relative complexité du processus législatif

Cette complexité tient moins aux conditions d’élaboration des textes normatifs, largement maîtrisées par le roi (1) qu’aux procédures de vérification de leur contenu, qui, dépassant le cadre du seul contrôle juridique, prirent souvent l’aspect d’une véritable censure politique fondée sur la défense d’intérêts sociaux, sur la promotion d’un programme de réformes ou sur des considérations d’opportunité (2).

1- Élaboration

Phase de concertation où s’exprime bien l’ambiguïté de la monarchie absolue : à la fois affirmation d’une puissance souveraine sans partage et prise en compte des revendications des corps constitués et des requêtes des particuliers. 2 phases essentielles sont à distinguer : celle de l’initiative, svt partagée (a), et celle de la rédaction proprement dite, confie aux spécialistes de la chancellerie (b).

a)- Initiative

Elle appartenait théoriquement au roi. Cepdt, le souverain ne manquait point de s’entourer des conseils les plus sûrs de diverses autorités compétentes par application du pcipe de gouvernement par grand conseil. Rôle essentiel joué par certains chanceliers (Michel de L’Hospital, D’Aguesseau, Maupeou) et ministres (Colbert, Necker) : furent de grands législateurs, ayant incontestablement exercé une activité créatrice.

Initiative pop. pas négligeable :

– requêtes des particuliers ou des corps sollicitant lettres patentes ou privilèges ;

– États généraux : les 3 ordres, eurent, jusqu’à leur dernière réunion, en 1614, une influence certes limitée mais non négligeable, par le biais des « cahiers de doléances », contenant de nombreuses propositions de réformes. Toutefois, tenus à l’écart de l’exercice du pouvoir législatif, ils demeuraient frappés d’impuissance lorsque le roi refusait de tenir compte des voeux qu’ils avaient formulés.

Malgré tout, au XVIè s. leur emprise sur la législation royale fut réelle : plusieurs ordonnances imptantes prises suite à leurs doléances (ordonnance d’Orléans faisant suite aux États d’Orléans de 1560, et ordonnance de Blois de 1579 consécutive à ceux tenus à Blois en 1576). Au XVIIè s. cette pratique tomba en désuétude, jusqu’à ce que Louis XVI les convoque de nouveau en 1789 pour faire adopter des réformes fiscales.

– États provinciaux, là où ils subsistent (Artois, Bretagne, Languedoc, etc.) faisaient annuellement parvenir au roi des cahiers particuliers pour le prier de prendre, ds tous les domaines du droit, des mesures appropriées à la conjoncture locale.

b)- Formalisation

Le souv. faisait préparer par son conseil ou l’une des sections de celui-ci le projet dont lui-même ou l’un de ses collaborateurs avait eu l’initiative. Pour les grandes réformes législatives, plusieurs procédures consultatives pouvaient être organisées :

  • Parfois, une commission spéciale de magistrats et de conseillers d’État, instituée à cette fin, procédait aux travaux préparatoires indispensables avant l’élaboration définitive de l’acte (cf. les grandes ordonnances de Louis XIV des années 1667-1685 : infra)
  • De même des enquêtes préparatoires furent fréquemment ordonnées pour élaborer plus sûrement des réformes prenant en compte les réalités locales et les avis fournis par les corps et communautés, les États, les notables, les praticiens, les parlements consultés à des degrés divers : méthode suivie par D’Aguesseau au XVIIIè s.
  • Enfin, jusque vers 1550, le roi associait volontiers les gens de sa cour de parlement qui donnaient ainsi leur avis avant la rédaction définitive d’un texte qu’ils enregistraient ensuite d’autant plus facilement.

Toutefois, ds la grande majorité des cas, les documents étaient simplement préparés par les commis des bureaux et les conseillers d’État rompus aux pcipes d’une monarchie de plus en plus administrative.

Finalement, et à l’ordinaire, un examen avait lieu au cours d’une dernière délibération du conseil du roi prise en présence du souverain qui tranchait les ultimes difficultés. Si l’acte était en forme de lettres patentes, il était alors envoyé à la chancellerie pour l’apposition du sceau ; sinon, il ne subissait plus aucun contrôle et était expédié directement par l’un des secrétaires d’État chargés d’en faire assurer l’exécution par les autorités locales.

2- Vérification

N’intervenant que ds le cadre des lettres de patentes, elle constituait le pcipal moyen juridique d’opposition à la volonté du monarque. 2 instances en étaient plus spécialement chargées : la chancellerie (a) et les parlements (b).

a)- En Chancellerie

Le chancelier, 1er personnage du royaume après le roi, était non seulement ministre de la justice, mais également chef du service des écritures et gardien permanent des sceaux du royaume. Homme d’expérience et le plus souvent éminent juriste, le chancelier avait le devoir de vérifier la conformité du texte avec la législation du royaume et de déceler si la confiance du roi n’avait pas été surprise à l’occasion d’un acte sollicité par un particulier : contrôle exercé sans exception et sans réserve de 1318 (date de l’ordonnance en portant institution) à la fin de l’AR. 2 hypothèses :

  • Texte conforme : apposition du grand sceau de France lors d’une audience publique (l’Audience du Sceau). Devait ensuite être envoyé aux cours souveraines afin d’enregistrement.
  • Texte jugé non conforme : le chancelier refusait d’apposer le sceau ; l’acte devait alors subir un nouvel examen, sauf si le roi passait outre et ordonnait à son chancelier de procéder aux scellement de l’acte. A ce stade, 2 attitudes du chancelier sont alors possibles :
  • acquiescement du chancelier, qui pouvait alors sceller le document avec la mention « scellé de l’exprès commandement du roi », ce qui aboutissait à décharger sa responsabilité ;
  • refus d’obtempérer plus ou moins durable. En cas de crise grave, le roi pouvait soit sceller lui-même, en reprenant temporairement les sceaux (comme Louis XV en 1757-1762), soit confier ceux-ci à un garde des sceaux nommé pour quelques mois ou pour quelques années = simple commissaire révocable.

N.B. : Cette phase d’authentification de l’acte était incontournable, correspondant, mutatis mutandis, à l’actuelle procédure de promulgation. Ensuite suivait l’étape ultime de la publication, assurée par le truchement de l’enregistrement devant les cours souveraines en l’absence d’un J.O.

b)- Par les cours souveraines

a)- La procédure d’enregistrement

  • Formalités de publication: La pratique de l’enregistrement des lettres patentes et de leur publication s’est introduite en coutume ds la 1ère moitié du XIVè s.. L’aspect technique l’emportait alors largement sur l’aspect politique. Il convenait simplement de porter à la connaissance de tous le contenu de la loi nouvelle. La formalité de l’enregistrement apparaît ainsi à l’origine comme un mesure d’ordre tendant à assurer la conservation, la publication et l’exécution des lettres royaux, ainsi que des traités et même des concordats. Se traduisait, d’un point de vue matériel, par la simple copie sur un registre conservé parmi les séries du greffe d’une cour de justice (registre aux ordonnances ; registre aux placards) : mémoire du droit législatif.

L’enregistrement se pratiqua donc ds ttes les cours souveraines d’abord à Paris, au plt et à la chambre des comptes, avt de s’étendre aux autres plts au fur et à mesure de leur érection et aux diverses cours souveraines financières, cours des aides, chambres des comptes, chambre du Trésor ou cour des monnaies. Prééminence morale et politique du plt de Paris.

  • Formalités de vérification: De bonne heure, et à l’invitation du roi, les cours souveraines, les cours souveraines lui ont adressé des observations à l’occasion des lettres qui leur étaient envoyées pour enregistrement. Ces observations, toute techniques, prirent le nom de remontrances ou de représentations. Prérogative générale des remontrances vite introduite en coutume, qu’il s’agisse de lettres de portée individuelle ou des ordonnances fixant la loi générale.

Par extension, les cours se virent investies d’un contrôle de légalité, tant sur la forme que sur le fond, non seult pour sauvegarder les intérêts du roi, mis aussi pr éviter les contradictions de sources, les conflits des lois et des coutumes. Bcp de plts en tirèrent profit pour protéger leurs particularismes locaux de droit coutumier ou de droit écrit. La prérogative d’enregistrement et de remontrance freina donc svt l’unification du droit.

  • Procédure: Procureur général du roi requérait l’enregistrement conformément aux ordres du souv. dont il représentait les intérêts au titre du ministère public. Les ordonnances relatives au droit privé, à l’état des personnes à la police générale, aux affaires d’Église, allaient devt le plt, tandis que les lois fiscales, financières et monétaires étaient transmises aux cours financières spécifiques qui possédaient les mêmes pouvoirs.

Le texte faisait ensuite l’objet d’un examen et d’un rapport par un ou plusieurs conseillers de la cour afin d’y déceler les éventuels erreurs, les anomalies, les abus de droit. En audience de Grand’Chambre, après avoir entendu les gens du rois, la cour opinait. S’il y avait conformité, le texte était transcrit immédiatement par le greffier. La cour souveraine, par les soins de son Procureur général en faisait exécuter des copies certifiées conformes, le plus svt imprimées pour les actes d’intérêt général qui étaient ensuite notifiées pour exécution aux juridictions subordonnées. Parfois, lecture prescrite au prône du dimanche ou « à cors et à cris » ds les lieux accoutumés.

b)- La pratique des remontrances

La cour pouvait également refuser l’enregistrement et, ds le secret de ses délibérations, adresser au roi de « très humbles et très respectueuses remontrances ». En renvoyant le texte, elle formulait ts ses griefs. Lorsqu’il s’agissait d’une ordonnance de grande imptce, le 1er président venait en personne exposer les motifs du refus au chancelier ou au ministre concerné. 2 hypothèses possibles :

– Le roi faisait droit aux observations : le texte était amendé et passait alors ss difficulté : solution fréquente car jeu du gvt à grand conseil.

– Le roi estimait au contraire que les remontrances n’étaient pas justifiées, il passait outre et ordonnait l’enregistrement d’autorité. Ce fut parfois le début de conflits fort longs :

* envoi de lettres de jussion (lettres patentes solennelles ou lettres closes, encore plus péremptoires)

* si refus persistant des parlementaires et remontrances itératives : nouvelles lettres. Ce jeu de navette entre le plt et le gvt se déroulait tandis que des tractations avaient lieu ds les coulisses. Lorsque le compromis échouait, soit la cour se résignait à enregistrer, en précisant qu’elle le faisait « de l’exprès commandement du roi », soit elle ne déférait pas aux lettres de jussion et se préparait à l’enregistrement « forcé ».

* procédure du lit de justice : recours extrême employé sult à l’égard des plts, et plus précisément du plus turbulent d’entre eux : le plt de Paris. Présence du monarque, accompagné de son chancelier, de pairs de France et de conseillers d’État suffisant à assurer la suspension de délégation accordée au plt : restauration momentanée du conseil du roi, au sein duquel précisément les pltaires n’étaient plus assujettis qu’à un devoir de conseil. Les lettres destinées à l’enregistrement étaient lues devant le roi ; le chancelier recueillait les vais de ses conseillers et le roi lui-même prononçait l’arrêt d’enregistrement. Le greffier transcrivait et le procureur n’avait plus qu’à veiller à l’exécution. Le roi avait donc le dernier mot. Néanmoins, l’histoire des remontrances révèle que plusieurs plts paralysèrent l’exécution des textes ainsi enregistrés par des arrêts contraires ou par la suspension du service de la justice, poussant la royauté à des mesures extrêmes, telles que l’assignation à résidence ou l’exil des parlementaires les plus rebelles.

Lorsque l’événement ne l’exigeait pas, ou si la cour souveraine était de moindre importance et éloignée, le roi ne siégeait pas en lit de justice et envoyait un porteur d’ordre (commissaire, conseiller d’État, gouverneur de province, ou le plus souvent : intendant) muni d’ordres enjoignant l’enregistrement forcé. C’était à vrai dire le procédé le plus habituel.

g)- Du contrôle de légalité à l’esquisse d’une censure politique

C’est donc seult au terme de l’enregistrement qu’une ordonnance pvait être exécutoire ds le ressort du plt concerné. La formalité avait une justification juridique et technique qui ne pouvait, en fin de compte, mettre en échec la souveraineté législative du roi. Toutefois, en invoquant des thèses politiques qui exaltaient la monarchie tempérée et au grè des événements qui mirent les plts au 1er plan, les pltaires dévièrent insensiblement d’un contrôle de légalité vers un contrôle d’opportunité leur assurant un pvoir politique : prérogative des remontrances devint le droit de remontrances que la monarchie absolue tenta de limiter : « procès des 300 ans. »

Contestation pltaire née avec l’affirmation de la monarchie absolue et cristallisée autour du plt de Paris. S’est développée pour 3 raisons essentielles :

– absence de séparation des pouvoirs autorisait les plts à intervenir autant sur le terrain judiciaire que fiscal ou adm. au nom d’une compétence polyvalente naturellement porté à se développer.

– royauté avait soutenu l’action des plts ds leur lutte contre les grands seigneurs ;

– circonstances de la fin du XVIè (guerres de religion, Ligue) firent des plts des autorités quasi-gouvernementales

Dév. d’une théorie politique faisant des pltaires les héritiers de la tradition et les représentants permanents des États généraux unis les uns aux autres ds la théorie des classes et ne formant qu’un seul corps. Imitation du plt britannique.

D’où un conflit très long, qui ne connut guère de répit qu’entre 1673 et 1715 (droit de remontrance a posteriori) et qui gêna considérablement les tentatives de réforme de la monarchie. N’a toutefois pas empêché une première esquisse de codification du droit aux XVIè-XVIIIè .

Section II : Le mouvement de codification

§ I- Les premières synthèses législatives

Il semble difficile de parler, sur le fond, d’une véritable œuvre législative, inscrite ds un programme d’ensemble cohérent, avant le XVIè s. Certes, dès le XIVè et par intermittence, le roi rendit de grandes ordonnances pour la réforme générale de l’Etat, le plus svt pour donner suite à des doléances de États généraux. Toutefois, il s’agit de textes épars, confus et faiblement novateurs : la coutume, bcp plus que les ordonnances royales faisait avancer le droit.

A partir du XVIè s. une succession de plusieurs souv. (Louis XII, François 1er et Henri II notamment) fit évoluer rapidement les institutions en prenant davantage conscience de l’importance cardinale du pouvoir législatif comme mode de transformation du réel. Dès lors, durant ce siècle, la royauté s’efforça de déterminer par voie d’ordonnances, en s’appuyant sur les États généraux ou sur les assemblées de notables, le nouveau cadre de l’activité publique et privée. Œuvre imparfaite mais assez bien perçue, car la volonté de réforme était autant celle des sujets que des monarques. 2 grandes périodes à distinguer :

– une période de réformation générale (XVIè-début XVIIè s.)

– un mouvement d’unification du droit inauguré par Louis XIV et ds une moindre mesure par Louis XV, qui parvinrent à une codification partielle grâce à une suite d’ordonnances dont une grande partie du contenu fut d’ailleurs reprise ds les codes napoléoniens (B).

A- Les ordonnances de réforme générale (XVIè – début XVIIè s.)

Réponses aux doléances des « États » du royaume, ces ordonnances, par l’extrême étendue des secteurs traités et leur grande diversité, se présentent sous un jour un aspect essentiellement hétéroclite :

– traitent des matières fort variées : une même ordonnance pouvait concerner la justice, la religion, la noblesse, le droit civil.

Ex : Ordonnance de 1561 : article 105 relatif à la révision des statuts de l’Université suit immédiatement une disposition prescrivant l’expulsion des Bohémiens.

– absence de systématisation et de classification ds ces lois : cela tient autant au peu de progrès de l’esprit de méthode qu’à l’état complexe de la société, et surtout aux réponses empiriques faites aux doléances des États généraux : sorte de dialogue législatif continu.

Caractère novateur pas moins incontestable, tant en droit public qu’en droit privé.

1- L’ordonnance de Villers-Cotterêts ( août 1539)

192 art. Sobrement intitulée « ordonnance sur le fait de justice » ; œuvre du chancelier Poyet apportant d’importantes innovations ds tous les domaines :

– En droit civil : mesures protectrices d’ordre public : insinuation des donations entre vifs (à l’origine de la transcription moderne) permettant à quiconque veut acquérir un droit réel sur un bien de vérifier sur un registre public si ce bien se trouve encore ds le patrimoine du cocontractant ; interdiction de tester ou de disposer en faveur de son tuteur ou curateur.

– En droit processuel : Limitation de la compétence des cours d’Église en matière matrimoniale ; réglementation de l’appel comme d’abus ; instauration de la procédure inquisitoire d’office par le ministère public en matière pénale ;

– Substitution du français au latin ds la rédaction des actes notariés ; 1ère organisation de l’état civil : curés enjoints de tenir à l’avenir des registres de baptêmes et de sépultures. Néanmoins, ces registres paroissiaux, conservés aujourd’hui ds les A.D, ne furent convenablement tenus qu’au siècle suivant.

Au total, cette loi demeura un monument du droit et s’inscrit comme un exemple type de texte pluridisciplinaire conforme à l’esprit de l’époque.

2- L’ordonnance de Moulins (février 1566)

Œuvre du chancelier Michel de L’Hospital. Réformait principalement la justice (perte de la compétence civile des justices municipales), mais touche aussi, d’une manière générale, le droit privé et le droit public :

– droit privé : exigence de la preuve écrite pour toute convention dépassant 100 L (art. 54), reprise ds l’art. 1341 du C. Civil. Interdiction de prouver contre et outre les actes = rév. ds le droit des preuves, puisque désormais « lettres passent témoins. ». Substituions soumises à un régime de publicité par la procédure de l’insinuation.

Au pénal : généralisation de la règle de la compétence du juge du lieu du délit plutôt que celle du domicile du délinquant : autant de nouveautés voulues par le pouvoir royal mais qui allait contre la tradition du MA.

– droit public : restriction du pouvoir des gouverneurs de provinces (avaient svt abusé de leur autorité à la faveur des troubles) ; défense d’imprimer des livres ss l’autorisation du pouvoir : nécessité d’obtenir un privilège spécial.

3- Le « Code Michau » (janvier 1629)

Vaste loi promulguée sous Louis XIII : vient clore, par un échec, la série des ordonnances générales. Répondait en pcipe aux voeux du peuple consulté : « Ordonnance sur les plaintes des États assemblés à Paris en 1614 et de l’assemblée des notables réunie à Rouen et à Paris en 1617 et 1626 ». Louis XIII s’était notamment engagé « au rétablissement de tous les ordres de son royaume » et à développer « la grandeur de son État et la dignité de sa Couronne. ». Conçue ds un esprit d’harmonisation et de novation, cette longue ordonnance de 461 art. traitait encore de sujets aussi divers que les affaires ecclésiastiques, universitaires, fiscales, maritimes et judiciaires. Elle s’efforçait de régler une série de questions touchant au droit privé (propriété, substitutions, donations, successions, faillites, prêts à intérêt), et c’est d’ailleurs la 1ère fois que le pouvoir royal visait à tant de réformes en un seul texte.

L’ordonnance n’en suscita pas moins une levée de boucliers, en particulier parce qu’elle allait à l’encontre de traditions biens établies (prétendait notamment établir la « directe universelle » du roi sur toutes les terres du royaume, sauf preuve expresse de leur allodialité) : les plts du Midi refusèrent l’enregistrement et nourrirent une longue polémique ; partout ds ceux du Nord (sauf en Bourgogne), l’enregistrement fut forcé. La royauté, pas encore assez affermie, ne put faire appliquer le texte, qui fut alors retiré. Par dérision, l’ordonnance prit le surnom de « Code Michau », du prénom de son auteur, Michel de Marillac, garde des sceaux de 1626 à 1630.

Annonçait pourtant les grandes ordonnances d’unification de la fin du siècle.

B- Les grandes ordonnances de codification

A la différence de leurs homologues du XVIè s., les ordonnances de Louis XIV et de Louis XV ont l’empreinte de l’unité. Le souci d’unité juridique est alors le corollaire de l’unité politique. A partir de Louis XIV, effort de la monarchie pour unifier et codifier, répondant ainsi à un besoin ressenti depuis longtemps, mais que seule une force coactive pouvait parvenir à concrétiser : multiplicité des textes royaux, confusion de leurs dispositions source de complexité, d’insécurité juridique et de divergences jurisprudentielles. D’où le dév. d’une aspiration générale vers plus de simplicité, même si l’unification totale du droit paraissait encore constituer une entreprise prématurée.

Méthode suivie : avant de réaliser l’unité ds le droit privé, qui variait considérablement d’une région à l’autre, il fallait d’abord l’imposer dans chacune des branches du droit. D’où l’idée de Colbert d’abandonner les réformes générales pour se concentrer sur des ordonnances n’envisageant à chaque fois qu’un sujet clairement déterminé. Par leur ampleur, leur clarté et leur méthode, ces ordonnances constituèrent immédiatement de véritables codes, divisés en titres et en articles cohérents. Comme oeuvres de composition et de législation, elles étaient en tout état de cause, très supérieures à leurs devancières des XVè-XVIè s. et annonçaient les codes napoléoniens, dont certains (Code de commerce, code de procédure pénale), n’en constituèrent que des éditions remaniées.

1- Colbert et la systématisation du droit

A l’époque où la monarchie absolue consolida son acquis, l’impulsion législative ne vint plus du chancelier mais de ministres d’État tels que Colbert et son fils le marquis de Seignelay : passage de la monarchie justicière à la monarchie adm. : « L’unité de la législation serait assurément un dessein digne de la Grandeur de Votre Majesté et lui attirerait un abîme de bénédiction et de gloire. »

But = réunir toutes les lois en cours d quelques codes et profiter de cette révision pour y introduire des réformes rendues communes à toute la France. L’idée est également d’abaisser la morgue des cours souveraines en rendant les textes législatifs plus clairs, et en limitant d’autant leurs possibilités d’interprétation et d’intervention.

Grandes ordonnances publiées entre 1661 et 1685, inspirées le plus souvent de Colbert et préparées par des commissions spéciales : conseil de réforme suscité par Colbert : composé de conseillers d’État et de praticiens et dirigé par son oncle Henri Pussort. En même temps, mais de manière indpdte : travail mené par le 1er président du plt de Paris, Lamoignon, en collaboration avec quelques éminents juristes. Le roi, informé de ce 2nd projet, fit se rejoindre les 2 initiatives ds une commission mixte : le conseil de réformation de la justice. C’est elle qui élabora, non sans tensions et controverses, les 2 premières ordonnances, civile (a) et criminelle (b).

a)- L’ordonnance civile (Avril 1667)

Code Louis = véritable code de procédure civile en 35 titres. Est avant tout l’œuvre de Pussort, défenseur des idées absolutistes tendant à limiter les pouvoirs des plts (à la différence de Lamoignon).

Une même procédure fut dorénavant imposée à tous les tribunaux français ; procédure surtout écrite, simplifiée par la suppression de formalités inutiles pour assurer des jugements plus rapides. Ordonnance de 1667 reprise à peu près textuellement ds le code de procédure civile de 1806 qui resta t. longtemps en vigueur. Le code civil de 1804 lui emprunta également le chapitre relatif aux preuves.

L’application du code suscita quelques résistances, mais la fermeté du gouvernement l’imposa, tandis que ses qualités et sa modernité assurèrent son succès.

b)- L’ordonnance criminelle (Août 1670)

1er code de procédure pénale. Vint combler le retard de la France sur les pays voisins. A l’instar de ce qui s’était passé pour l’ordonnance civile, le roi, ne pouvant pas plus intervenir de plain pied en droit pénal qu’en droit civil, réglementait la forme à défaut du fond.

Au cours des travaux préparatoires, Pussort s’est efforcé de simplifier les règles de procédure écrite en vue d’une répression plus rapide et exemplaire des crimes et délits ; Lamoignon se fit, sans succès, le défenseur des intérêts des inculpés. Cet texte prolongeait l’ordonnance de Villers-Cotterets (1539), maintenant notamment l’instruction secrète et les pénalités de cette époque. Peu libérale, l’ordonnance confirma l’interdiction pour l’accusé d’avoir un défenseur, et conserva la torture et le serment de dire la vérité imposé aux accusés, même contre eux-mêmes. Le système des preuves légales et les procès aux cadavres subsistèrent également.

Malgré ces défauts, l’ordonnance présentait un progrès indéniable sur l’état antérieur du droit :

– appel obligatoire au plt en cas de condamnation à une peine capitale ;

– réduction de la justice pénale à 2 degrés ;

– contrôle plus sérieux de la justice seigneuriale ;

L’ordonnance servit de base aux lois criminelles plus libérales de 1791 et de l’an IV, mais surtout elle fut littéralement la source du Code d’instruction criminelle de 1808.

Ce texte, comme celui de 1667, fit l’objet de nombreux commentaires, dont le + fameux et le + minutieux = celui de Daniel Jousse.

Enfin, d’autres ordonnances furent rédigées par le seul conseil de réforme cette, fois, c’est à dire sans l’intervention des magistrats : ordonnance sur les eaux et forêts (août 1669) ; ordonnance de commerce, également appelée Code Marchand ou Code Savary (mars 1673) ; ordonnance de la marine (Août 1681) ; Code noir (mars 1685) « touchant la police des îles de l’Amérique » : 1er code colonial, réglemente notamment l’esclavage.

2- D’Aguesseau et l’évolution vers un droit civil commun

Henri-François d’Aguesseau, chancelier de 1717 à 1750, travailla ds le sens d’un droit civil commun en publiant 3 ordonnances dont l’objet avoué = l’harmonisation de la jurisp. de quelques matières (donations, testaments, substitutions), sans prétendre porter atteinte aux coutumes des lieux.

Le chancelier avait cepdt le projet d’une codification bcp plus imptante, à laquelle il travailla toute sa vie, mais il dut se contenter d’une unification t. parcellaire. Son principal collaborateur ds cette tâche = le procureur général du plt de Paris, Joly de Fleury, h. de dossiers et d’une grande autorité morale. Afin de bien connaître la jurisprudence des plts : rédaction d’un questionnaire relatif à chacune des matières visées par les réformes et portant sur les points les plus controversés. Réponse t. détaillée émanant des différentes cours souveraines servant de base à la rédaction des différentes ordonnances :

  • Ordonnance sur les donations (février 1731)
  • Ordonnance sur les testaments (août 1735) : Déf. de 2 régimes, l’un pour le Nord, l’autre pour le Midi : représente paradoxalement une étape vers l’unité.
  • Ordonnance sur les substitutions (août 1747)

Apport donc apparemment limité : ne concerne qu’un secteur étroit du droit privé, celui des actes de transmission à titre gratuit : domaine technique où l’unification du droit parut le plus facile à réaliser.

En outre : caractère fragmentaire et lacunaire de cette entreprise : en droit privé surtout, peu de questions ont été réglées, et les ordonnances de Colbert traitent de sujets qui n’étaient en rien du ressort de la coutume (commerce, procédure, droit maritime). De manière significative d’ailleurs, il est à remarquer, à côté de l’absence d’un J.O, le défaut de recueils officiels de législation royale : collections privées s’efforcent d’y suppléer (comme les Édits et ordonnances des rois de France depuis François 1er jusqu’à Louis XIV, de Néron et Girard, publié pour la 1ère fois en 1647).

Œuvre néanmoins imptante par sa postérité doctrinale et surtout législative : Brèche par laquelle l’Etat monarchique a imposé son rôle de législateur général, ouvrant une voie qui fut ultérieurement poursuivie par la Rév. puis par les codifications napoléoniennes. A été rendue possible par l’assomption de la loi et par l’abaissement concomitant des autres sources du droit.